lundi 27 février 2012

Les mille voyages qu'on a fait sans en parler à personne: début de la rétrospective

Nous avions sous-estimé le bonheur que peut procurer la Go-Pass : offert par la SNCB aux jeunes de moins de 26 ans, ce merveilleux titre de transport permet de voyager à travers la Belgique pour 5 euros le trajet.
Et il se trouve que la Belgique est un très beau pays.
Et il se trouve que nous avons seulement trois jours de cours par semaine.

Nous avons aussi des destinations hors Belgique prévues (une fin de semaine à Paris la semaine prochaine, une autre à Londres en avril, 10 jours en Crête pour les vacances de Pâques, Kiev ira sans doute une semaine en Suisse juste avant), mais nous voulons avant tout bien explorer notre pays d’accueil, ses gaufres, ses alcools et ses campagnes.

Mais justement, nous avons tellement le temps d’explorer le pays que nous choisissons des destinations au hasard, selon les horaires des trains, et que nous errons dans les villes sans carte… ce qui peut réserver bien des surprises.

Samedi, nous avions prévu partir très tôt pour aller visiter le château fort de Bouillon, mais nous sommes finalement arrivés trop tard à la gare; nous aurions manqué le bus de correspondance à Libramont. Le prochain train à partir nous emmenait à Gand, à 30 minutes de train de Bruxelles. Sans nous douter de rien, nous avons pris ce train.

Mon doux, Gand est la plus belle ville que j’ai vue de ma vie.


 Le beffroi.








 Le château des comtes de Flandres, en plein centre-ville.  Quand on ne s'y attend pas, ça surprend.


 Et bien sûr, on pouvait le visiter, sans guide: courir dans les donjons, dans la salle de bal et regarder à travers les meurtrières.

 Vue depuis les murailles du château.







On est pas trop déçus de ne pas avoir visité le château de Bouillon, finalement. 


 Comme si ce n'était pas déjà trop beau pour être vrai, la ville est sillonnée de canaux.


 Juste 3000 bâtiments ''patrimoine mondial de l'UNESCO'' sur notre chemin.


À la Cathédrale Saint-Bavon, que nous visitions innocemment, simplement attirés par sa façade extérieure, était exposé le VRAI retable de l'Agneau mystique de Van Eyck.

http://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Agneau_mystique_%28Van_Eyck%29

On ne le savait pas: je n'en croyais pas mes yeux. Mon audioguide m'a fait une analyse complète des différents panneaux; saviez-vous que plusieurs bâtiments représentés évoquant Jérusalem sont en fait des calques des monuments de Gand, où Jan et Hubert Van Eyck habitaient? L'angle de vue d'un des bâtiments permet même de repérer où était situé l'atelier du peintre au 15e siècle. Je suis impressionnée. La reproduction du panneau volé des "Juges intègres'' m'a bien fait penser à Jean-Baptiste Clamance, amis camusiens.




mardi 21 février 2012

Le carnaval de Binche

Férié pour Mardi gras (ah, ces Belges!). C'est Carnaval, en Belgique. Et c'est à Binche qu'ont lieu les plus grandes festivités: la parade des gilles.


 Le carnaval de Binche.

C'était quoi, au juste, être « gille » ? À ce que nous avons compris, cela implique de se déguiser, de parader dans les rues, d'animer trois jours durant une grande fête au centre-ville de Binche en suivant une diète très stricte se composant exclusivement d'huitres et de champagne (en vente libre aussi pour les touristes dans des kiosques). 


 Une rue paisible de Binche, loin du centre.


Bien que nous n'avons assisté qu'à une partie des festivités, nous avons été servis en fait de curiosités et de chocs culturels. Déjà à notre arrivée, les rues de la ville étaient jonchées de confettis, de bouteilles de bière et de cornets de frites vides. Pas de doute, la fête était déjà bien entamée.


Peu de temps après la parade, le long des rues.


C'est à croire que toute la Belgique y était. Des milliers de personnes attendaient patiemment (et patient, fallait l'être !) le long du chemin qu'emprunterait la parade des personnages costumés. Pour patienter, il y avait quand même de la bière à bon prix – une fille endormie sur le pas d'une porte à trois heures de l'après-midi ? C'était carnaval, pour vrai. Les enfants dansaient dans les clubs, ouverts en plein jour et crachant dans les petites rues moyenâgeuses des airs de Lady Gaga. Lors de la parade, les pères portaient sur leurs épaules leur fillette endormie.

Quand les « gilles » ont finalement paru, la fête a vraiment commencé. Le cortège était mené par les enfants, parés de divers costumes. Dans l'assistance, personne n'a pu nous informer sur l'origine exacte de cette orgie de couleurs, de banderoles et de maquillage. On ne se posait pas la question, c'était comme ça, c'est tout.








Derrière eux, il y avait les plus grands. Plusieurs groupes d'hommes de la ville, regroupés en « sociétés », ont passé l'année entière à économiser pour ce grand moment. Parés de costumes folkloriques, ils paradaient au son de l'orchestre qui poussait, sans trêve, la même mélodie typiquement carnavalesque, au rythme de laquelle les membres du cortège dansaient, faisant carillonner les cloches de leur déguisement. 






 Cette photo définit à elle seule le concept de choc culturel.


Mais le truc le plus important de la parade, et le plus « frappant », dans tous les sens du terme, c'étaient les oranges. Nous avions auparavant remarqué que toutes les vitres des rues qui bordaient le parcours de la parade étaient protégées par des grillages: pourquoi donc? Les grands comme les petits « gilles » étaient munis de paniers d'osier remplis d'oranges sanguines, fruits qu'ils lançaient, souvent à l'aveuglette, sur la foule en délire. Bras levés, les gens se battaient pour attraper les agrumes-projectiles, quand ils ne les attrapaient pas avec la tête. Ah ! C'est donc à ça que servent ces grillages ! Dans la foulée, j'ai quand même vu des oranges atteindre les vitres du quatrième étage, qui n'étaient pas protégées, et qui auraient bien pu voler en éclat. Notons quand même la présence d'ambulanciers, figure rassurante dans le brouhaha général. Je crois tout de même que personne n'a été blessé. Mieux encore : nous avons rapporté de quoi faire du jus.


 Miam ! Et en plus elles sont bonnes (quand elles sont en un morceau) !

lundi 20 février 2012

Petit guide de survie pour étudiante québécoise en échange en Belgique


Étudiante québécoise, rien ne doit te surprendre. Tu voulais étudier en Belgique; eh bien, t’y voici.

On t’avait pourtant prévenue, au Québec : « si tu veux être encadrée, va étudier aux États-Unis, PAS EN EUROPE : aux États-Unis, l’université d’accueil emmène tous les étudiants étrangers en autobus acheter des oreillers au Wal-Mart le jour de leur arrivée; en Europe, il faut être… plus indépendant. »

N’essaie pas de constituer ton horaire avant la rentrée scolaire : les premiers jours d’école, assiste à tous les cours possibles et choisis à partir de là. Personne, à part les professeurs, ne peut t’informer sur les cours (les prérequis, la matière, l’horaire qui change chaque heure, le numéro du local, etc.); si tu veux t’amuser, demande de l’aide à une conseillère pédagogique ou à une secrétaire, qui frappera sur son ordinateur en maudissant le portail de l’université. Les coordonnatrices académiques écriront à tous les étudiants étrangers : « Dites-vous bien que n’avons pas accès à plus d’information que vous! »

Les locaux indiqués sur les horaires (quand ils le sont) ne sont pas les bons; ne sois pas surprise de te retrouver dans un cours sur l’ « Histoire de l’éducation », alors que tu croyais assister à un cours de philosophie. Assieds-toi près de la porte pour pouvoir quitter subtilement le cours et éviter le discours sur comment devenir un bon professeur au secondaire.

Tu ne recevras aucun plan de cours. Tes professeurs ne commanderont pas les livres à la librairie universitaire; tu devras les chercher dans les bouquineries. Tes professeurs ne se présenteront jamais. Tu ne sauras leur nom que très tard, quand tu auras à les contacter et que tu trouveras l’information dans le bottin universitaire. Tu les appelleras ''Monsieur, Madame'' et tu les vouvoieras. Tu ne seras pas non plus avertie de l’ordre des lectures. Les échéanciers sont un luxe canadien, tu l’ignorais : tu t’ennuieras parfois de la rigueur de tes professeurs québécois.

Tes cours dureront pour la plupart 2 heures, 1h30 si tu calcules que le professeur arrive avec 15 minutes de retard et termine 15 minutes plus tôt. On appelle ça « le quart d’heure académique ».

Ne te fais pas d’illusion, les professeurs ne liront pas tes messages. S’ils te répondent (quand ils le font), cela paraitra évident : alors que tu auras d’emblée annoncé « Bonjour, je suis une étudiante canadienne in-coming », ils te répondront « Bonjour MONSIEUR ». Si tu poses une série de questions, tu n’auras de réponse qu’à la dernière. Tu apprendras à aller droit au but.

Tu auras des rencontres avec 80 autres étudiants dans un local de 15 places; des séminaires à 10 personnes dans un auditorium; des cours dans des classes datant de 1831, avec des bancs de bois; d’autres dans des « unités préfabriquées »; des groupes de 400, d’autres de 4.

Tu n’auras aucune lecture théorique. Je répète : aucune lecture théorique.

Ta coordonnatrice académique partira en voyage du 19 février au 26 février alors que toi et 150 autres étudiants « in-coming » devez fixer avec elle votre contrat d’études pour le 27 février. Tu seras avertie la veille de son départ. La responsable administrative des étudiants étrangers sera disponible le mardi et le jeudi de 14 h à 16 h (c’est tout) et elle arrivera à son bureau à 14 h 40, en vérité. Elle sera en vacances la semaine de votre arrivée.

Tu tomberas sur un exemplaire de Ballades et romances de 1882, dédicacé de Mickiewicz fils, en location libre à la bibliothèque de l’université.

Il n’y a pas de doute : étudiante canadienne (ici, c'est comme ça qu'on t'appellera), tu es bien en Belgique.

On dit que c’est pire en France; que des étudiants font des courses à quatre pattes dans des auditoriums pendant le cours, que les élèves de première année de médecine se bloquent l’accès aux salles de classe; qu’en Italie, ton horaire est à peine fixé à la veille des examens. Tu ne sais pas départager la légende urbaine de la réalité, tellement rien ne te surprend plus.

En Belgique, l’âge légal pour boire est 16 ans. « Quoi, au Canada, les bars ferment à 3heures du matin et les cours commencent à l’heure? » Tu étonneras tous les étudiants belges avec ta culture « conservatrice ». Tu croiseras des gens saouls dans les premiers trams, vers six heures du matin, alors que tu vaqueras à des activités innocentes, comme te rendre au marché.

Tu auras congé pour Mardi gras et deux semaines de vacances à Pâques.

Tu auras des amis mexicains, sud-coréens, singapouriens, grecs, tchèques, suisses, français, espagnols, péruviens, lithuaniens, pakistanais, dans la même situation que toi. Tu parleras surtout anglais.

Tu achèteras des trajets Bruxelles-Zurich moins chers que Sherbrooke-Montréal.

Le 20 février, ce sera déjà le printemps.

vendredi 17 février 2012

On aura le temps de faire la fête, finalement


Je croyais que mon séminaire de recherche serait du sérieux. Il y avait une grosse fête Erasmus hier : je n’ai bu que quelques bières et je me suis couchée tôt (plus tôt que les autres, du moins). Finalement, j’aurais pu fêter jusqu’à l’aube.

J’ai appris :
·      Que Tahar Ben Jelloun était un bon écrivain avant de se mettre à tout expliquer à sa fille (Le racisme expliqué à ma fille)
·      Ce qu’est un divorce à l’italienne : si un mari surprend sa femme avec un autre homme et la tue dans cette situation compromettante, les circonstances atténuantes font qu’il s’en sort avec simplement 3 ans de prison. L’écrivain Amara Lakhous donne à lire l’histoire d’un homme qui s’arrange pour que sa femme le trompe pour pouvoir la tuer et se remarier ensuite avec une femme plus jeune : notre professeur nous le racontait en riant et en se tapant sur les cuisses.
·      15 minutes de théorie postcolonialiste de Spivak et Saïd.

Maintenant, je dois écrire en trois mois une analyse de 15 pages sur un des romans au choix (de Ben Jelloun, Lakhous ou Lobo Antunes).  Les consignes :
·      démontrer qu’on a lu le roman
·      ne pas plagier
·      traiter d’un sujet ayant trait au postcolonialisme ou, du moins, d’identité.
·      Le cadre critique? Pas de souci, les amis, le prof a photocopié deux articles de 10 pages qui suffisent.

Mon doux.

Autre scène marquante :
Le professeur parle d’un livre et demande à un étudiant qui acquiesce s’il l’a déjà lu. Il répond :
- Non, je l’ai étudié à l’école.
Ajout à mon lexique. Étudier à l'école= ne pas lire les livres.

Dans tout ça, je vais à Amsterdam demain.

- Kiev

À l'ULB, on est crédités pour se faire des amis


 J’ai trouvé une partenaire de tandem linguistique : Julia, une New Yorkaise étudiante en anthropologie. Mon horaire est donc complet : 9 activités de deux heures pendant le quadrimestre avec cette anglophone sympa et la rédaction finale d’un texte de 4 pages bilingues en commun me donneront les ECTS manquants (sujet proposé pour le travail final= le chocolat belge) . L’assistante responsable de notre projet nous conseillait des activités: « vous pouvez aller prendre un café pour commencer, puis aller dans un musée, cuisiner ensemble, discuter d’articles qui vous intéressent, visiter un coin de la ville que vous ne connaissez pas ».  
-Kiev

mercredi 15 février 2012

Pays de la bière.


Mes bières préférées, jusqu'à présent (avec la Chimay, absente de la photo de groupe)

mardi 14 février 2012

Qu'est-ce qu'on étudie, à l'ULB?


Il ne faut pas oublier que nous sommes ici pour étudier. 
Voilà donc comment se profile ma session (pardon, quadrimestre) belge:

Littérature russe de la 2e moitié du 19e siècle:
Mon bonbon, mon bonheur, le cours pour lequel je me suis inscrite à l'ULB et qui ne se donne heureusement pas en russe. La période, très précise, est le siècle d'or de la littérature russe: Tchernychevski, Gontchorov, Tourgueniev, Tolstoï, Dostoïevski. La liste de lectures est colossale: Guerre et Paix au complet, Crime et châtiment, des points bonus si on lit aussi Anna Karénine et Les Frères Karamazov. 
L'examen final est oral et consiste à expliquer à la professeure pourquoi ces auteurs sont des génies. Pour vrai.

 Littérature polonaise (la période romantique): 
Il s'agit pour moi d'une découverte: alors que les auteurs russes font partie de nos sommités littéraires, je n'aurais pas su nommer un auteur polonais avant de m'inscrire au cours. J'avais déjà entendu parler  de Mickiewicz, mais sans connaître son origine polonaise (alors que la Pologne a quand même reçu 4 prix Nobel au 20e siècle, comme le souligne elle-même notre professeur). 
Je me fais toujours avoir à noter des gros titres en polonais que je crois être des noms d'auteur, mais non. '' Kult Mlodosci'' n'est pas un auteur romantique, mais bien ''Culte de la jeunesse'' en polonais.  Oups. J'ai signé un pacte avec Google traduction pour qu'il garde secrète ma naïveté. 
L'examen final est oral et consiste à expliquer à la professeure en quoi les oeuvres au programme sont typiquement polonaises. Pour vrai. 

Histoire de la photographie:
Je profite du volet ''culturel'' de mon programme en ''Études littéraires et culturelles'', mettons. Mais c'est un cours d'histoire de l'art particulièrement passionnant, et qui diversifie ma formation. 

Séminaire de fin de cycle en Langues et littératures romanes:
Le titre est plutôt littéral: tous les étudiants du programme dans lequel je suis théoriquement inscrite sont séparés en sous-groupes pour travailler sur différents sujets de recherche. Je vais travailler sur la ''narration postcoloniale: réflexion littéraire sur l'Europe contemporaine'. Je me réjouis d'avoir au moins un travail écrit à rendre, pour contrer un peu mon dépaysement académique (quossé ça, des examens oraux et aucun travail écrit).
Ce qui est particulièrement sympathique dans ce cours, c'est qu'après trois séances où le professeur présente le sujet et les modalités de recherche, le travail est personnel. Je peux donc y travailler quand bon me semble, et aller à Amsterdam, Londres, Berlin, Berne, Genève, Grenoble, quand bon me semble. 

L'Union Européenne et ses institutions
Bon, c'est le moment où vous comprenez un peu moins le lien avec une formation littéraire.  En vérité, je profite des trois ''cours à choix'' (comprendre: prenez des cours en ce que vous voulez, go) accordés par ma faculté québécoise pour suivre ce cours prévu exprès pour les étudiants ''Erasmus''. Au programme: conférences sur le multiculturalisme, visite d'Anvers, visite aux Institutions européennes, examen conçu pour être réussi. Du véritable tourisme scolaire, mais qui donne des crédits.

Il me manque encore un cours (tous donnent 5 ECTS, et il m'en faut 30 pour obtenir 15 crédits québécois) et j'étudie la possibilité de faire un ''tandem linguistique'' en anglais ou en espagnol: avec un étudiant anglophone ou hispanophone, j'aurais un rendez-vous par semaine pendant lequel nous parlerions une heure en anglais/espagnol, une heure en français, avec un projet commun bilingue à la fin du quadrimestre... Et voilà, des crédits qui nous tombent sur la tête. C'est génial comme idée, vraiment. 

Sinon, je viens d'apprendre que j'avais accès à tous les cours de Master. Merci, vraiment, ULB, de me l'avoir dit plus tôt (L'ULB est une université absolument merveilleuse, pleine de ressources, mais il faut les chercher). Reste que le cours sur l'Histoire du cinéma belge, donné en salle de visionnement, me tente pas mal.  

La vie est dure, vraiment.  

-Kiev 

ULB

À l'ULB, on a des cours à 4 étudiants le matin, et à 400 l'après-midi.

vendredi 10 février 2012

Rétrospective sur notre recherche d'appartement.

Depuis le début, nous voulions faire un article sur notre recherche d'appartement, ici, à Bruxelles. Ça n'a pas été une partie de plaisir, mais le résultat en vaut la peine !

Nous avions toutes les contraintes: il nous fallait un bail de six mois (alors que la norme est un contrat de trois ans, ici), un logement meublé et si possible équipé (acheter ustensiles, draps, et cie pour un si court laps de temps devenait un peu compliqué), dans Ixelles, St-Gilles, Uccle, Etterbeek, Woluwe (pas trop loin du Solbosch, bref, mais il s'agit de quartiers chics). Kiev a vite abandonné l'idée d'avoir un four pour faire des végépâtés et des gratins: en bas de 600 euros par mois, les logements étaient simplement équipés de deux taques pour cuisiner.  En plus, nous sommes étrangers ET étudiants, donc c'est très difficile de mettre les proprios en confiance.

Notre ambition de départ était de trouver un logement depuis le Québec, par internet. Alors ça, ça n'a rien donné. Entre les vieilles veuves italiennes qui voulaient recevoir un dépôt équivalent à trois mois de loyer, deux mois d'avance et par "une agent spécial Ebay" (?!), les studios une pièce pour location de courte durée (1300 euros + charges/mois !) et les demi sous-sol crasseux sous contrat de location d'au moins 3 ans, il n'y avait rien à faire... Au consulat général de Belgique, on nous conseillait simplement de faire nos recherche depuis Bruxelles. Comme les Bouhon nous accueillaient (et je le redis : quel accueil !), nous avons pris notre première décision à la mode "Belge", c'est-à-dire remettre à un peu plus tard et cesser de se prendre la tête. Du coup, c'était la bonne chose à faire.

Fast-forward jusqu'à notre arrivée dans la capitale de l'Europe: les premières visites d'appartement ont été... peu convaincantes. D'abord, la plupart des logements n'étaient disponibles qu'à partir du mois prochain, alors le choix était plutôt réduit. La visite la plus mémorable est sans doute celle d'un appartement dans le quartier Etterbeek. D'abord, le proprio nous donne rendez-vous devant la station de métro la plus proche, et pour qu'on puisse le reconnaître, il se décrit simplement comme un "grand homme blond". Nous n'attendons que quelques minutes devant les escalators avant qu'un homme – grand, ça oui ! Mais voûté, quand même – s'approche de nous. Il doit avoir vu au moins soixante-dix hiver, et sa chevelure – blonde peut-être dans un passé lointain – est blanche comme neige. Il nous souhaite la bienvenue dans un accent germanique assez marqué, et je remarque tout de suite ses yeux, d'un bleu perçant. Tout le temps qu'a duré la visite (un petit studio sympa, mais bien trop cher), vous devinez que les morceaux du puzzle se sont mis en place dans ma tête. C'est quand il a parlé des communautés ethniques qui "envahissaient peu à peu" les bons quartiers que je n'ai pu faire autrement que de lui imaginer un passé sombre... Enfin, Kiev dit que je me fais des idées. Quand même !

Bon, voilà pour ma partie de l'histoire. De fil en aiguille, on a fini par trouver une offre pour un appartement absolument génial. On a eu de la chance de trouver la perle rare. Et la perle rare, ça l'est !

Matthew

 Notre salle à manger.


 La chambre (et le petit bureau de Kiev avec la super vue)


La cuisine


On a trouvé une colocation juste en face de notre campus: on voit l'université de notre balcon. Parce que oui, on a un balcon, deux même (!) On vit avec Kolia, une bordelaise très sympa qui n'arrête jamais de sourire. Elle est lobbyiste pour une compagnie de recherche contre le cancer (le lobbying à Bruxelles est un feu roulant à cause des institutions européennes). L'appartement est au cinquième étage, donc la vue sur la ville est incroyable. On a: deux balcons, une machine à laver, un lave-vaisselle, un foyer, un bain (très très rare dans les appartements à Bruxelles), des matelas de sol pour accueillir les amis de passage. Le grand luxe, quoi. 


Le balcon et l'ULB (l'édifice en briques rouges). 


La vue panoramique.


Mercredi soir, je suis restée coincée une demie-heure dans l'ascenseur MINUSCULE du bloc appartements avec Nicole, Adrienne et Georges qui nous aidaient à monter nos sacs. Ça m'a aidé à dompter ma claustrophobie (Nicole nous a raconté des tonnes d'histoires et ça a été un très bon moment, en fait, dont on se souviendra longtemps), mais nous montons désormais par les escaliers. 

Coincés dans l'ascenceur (avec Georges, aussi)
Les escaliers qu'on doit maintenant monter.



L'appartement appartient à une Danoise qui sous-loue jusqu'en juillet parce qu'elle est en voyage au Groenland et au Brésil (surprenantes destinations à agencer). Elle nous a donc laissé toute sa vaisselle, ses livres, ses draps, son alcool, ses mille variétés de thés... ainsi que de la nourriture pourrie, un sac de bobettes sales sous le lit, de la poussière et des poubelles pleines. On a fait beaucoup de ménage entre nos cours, mais on y est très bien à présent.


Ma première lecture de la session (Guerre et Paix) dans le salon. 



Notre premier repas (salade grecque) dans notre appartement parfait.

– Kiev


mercredi 8 février 2012

Lexique


Beau'f = Beau-frère exaspérant et désagréable.

Chez moi = De mon côté (i.e. dans mon assiette, dans mon jeu, etc.). Exemple : « Regarde pas chez moi ! ».

Le bazar = À peu près n'importe quoi qui n'est pas pas particulièrement ordonné. Exemple : « On va partir le bazar ! » (le lave-vaisselle) – « On va ranger le bazar ! » (le désordre) – « Où t'as mis le bazar ? » (sac d'école).

Pralines = Petits chocolats fourrés (même avec autre chose que de la praline).

Chicons = Endives.

Septante = Soixante-dix.

Nonante = Quatre-vingt-dix.

Octante = PAS quatre-vingt. Ça c'est en Suisse. Les Belges admirent cette rigueur.

S'il vous plait = Comme chez nous, mais on le dit aussi en offrant quelque chose. Par exemple, au marché : « 1,50 euros s'il vous plaît ! » – *donne l'argent* – « Voilà vos tomates ! S'il vous plait ! » – « Euhhh... ça fait plaisir ? ».

Merde / Putain / Bordel = La vulgarité ultime.

Câlisse / Tabarnack / Crisse = Des onomatopées étranges.

Des moules-frites = Faire semblant que deux accompagnements mis ensemble font un repas.

« Il fait très très froid dehors ! » = - 2 degrés Celsius.

« Il fait chaud dans ta maison ! » = 19 degrés Celcius.

Désastre naturel = 5 centimètres de neige.

16/20 = 95 %

Gros projet final en dernière année de bac = Un travail de quinze pages.

Le local indiqué sur l'horaire = Sûrement pas le bon local.

L'heure à laquelle les cours commencent = S'ajuster selon le fuseau horaire (ULB) + 00:15.

« Je vais à Amsterdam ce week-end. »= Phrase tout à fait banale.

À suivre.

lundi 6 février 2012

À la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule


À la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule, la gentille bénévole, les cheveux blancs et fins, chuchotant comme dans un silence religieux malgré l'écho des pas des visiteurs, me fait la conversation. Elle me raconte la construction du lieu sain, selon l'architecture romane et puis gothique, son amour pour l’endroit; elle rit parce que je ne connais rien au latin (qu’est-ce qu’ils nous apprennent, enfin, au Canada??) Alors que je fais un mouvement pour partir, elle me tient les mains et me demande de lui parler encore : l’accent québécois l'émeut.


Elle me raconte l’année 1945, elle avait 15 ans; elle tente de calculer son âge maintenant, 87, non 83 – je l’aide, ça fait 82 ans je crois, elle ne doit pas se vieillir comme ça, elle paraît bien après tout. Enfin, cela n’a pas d’importance, elle continue : le jour de la libération, les Canadiens français ont été les premiers à arriver à Bruxelles. Notre accent est celui de la libération, c’est pour cela qu’elle aime tant nous entendre parler. Oh madame. Je ne comprends rien au latin, d’accord, mais je veux bien vous parler encore un peu.


Kiev-

dimanche 5 février 2012

Ici, tout commence lentement, ne vous en faites pas


Les moules. Les frites. Les chocolats. Les gaufres (les craquantes et moelleuses de Bruxelles, les fourrées de Liège). Le pain baguette et le vin français. Les fromages. La bière. Les croissants. Mais, encore plus : les chicots amers que les enfants laissent dans les assiettes et qu’on gobe, curieux. La soupe à l’oignon. Le gratin. Les risottos. Les carbonades. Le sabayon. Oh la la.

Et ce qui est le plus merveilleux, c’est qu’on a le temps. Six mois pour goûter. Notre santé n’en souffre pas : nos sandwichs sont simplement plus craquants qu’au Québec, notre alcool moins cher, le choix du dessert plus difficile.

Le temps, justement. « Ici, tout commence lentement, ne vous en faites pas », nous a-t-on dit  à l’ULB. Les horaires ne sont définitifs que trois semaines après le début des cours, j’ai un cours demain dont je ne connais pas le local, les professeurs prennent un temps fou à répondre aux courriels, les secrétaires arrivent avec une demie-heure de retard aux rendez-vous fixés. Je suis ici pour étudier, mais je n’ai aucune idée de ce que j’étudierai : le cours de littérature russe requiert-il une connaissance du russe? Personne ne le sait, je n’ai qu’à aller au cours pour voir.

Je ressens une impression de décalage d’avec la vraie vie qui, je crois, ne me quittera pas de tout mon séjour : Google est en néerlandais, je peux marcher sur la Grand-Place tous les jours, je me déplace en tramway. Les Belges rangent le lait et les œufs sur le comptoir. Les jeunes s’appellent Perrine, Oriane, Georges, Oscar, Hortense, Barbara; on cherche les Roxanne et les Marie-Ève. Je suis amie avec des étudiants de la Corée du Sud. Chaque soir offre une nouvelle occasion pour boire de l’alcool.

Tout est merveilleux, en somme.

Kiev